Mesure discriminatoire du Conseil régional Hauts-de-France à l’encontre des attachés principaux cadres de projet et d’expertise et mise en danger de l’ingénierie publique régionale
Après avoir sensiblement appauvri la qualité de l’ingénierie de projet publique et la carrière des agents qui la portent, c’est une nouvelle décision discriminatoire à l’encontre de cadres de projets et d’expertise qui vient d’être prise par l’exécutif du Conseil régional des Hauts de France, mettant ainsi par ailleurs en danger la qualité de l’ingénierie publique régionale…
Les cadres A ont déjà récemment été très lourdement négativement impactés par les réformes nationales du Gouvernement Hollande qui ont éclaté leurs cadres d’emplois en deux, en créant les nouveaux cadres d’emploi d’attachés et d’ingénieurs hors classe, rallongeant très sensiblement leur déroulement de carrière interne. Ce rallongement très notable de carrière spécifique aux cadres A vient en plus s’ajouter aux conséquences néfastes identiques du PPCR qui impose dorénavant à tous chaque passage d’échelon à durée maximale…
Dans ce contexte déjà lourd tant sur les conditions de travail de nombre de cadres que sur la qualité et la reconnaissance de l’ingénierie publique, l’exécutif du Conseil régional Hauts de France depuis un an, semble vouloir aller encore plus loin en faisant le choix de pénaliser ses attachés territoriaux, cadres de projets et d’expertise (à savoir tous les attachés non encadrant d’équipes) et, ce, à l’encontre de la Loi et malgré le fait que l’ingénierie de projet publique soit une solution efficace reconnue à la mise en œuvre de services publics de qualité et conformes à l’intérêt général (et moins coûteuse au global que la délégation au privé). Car, en Région Hauts de France comme ailleurs, l’ingénierie de projet est réalisée tant par des ingénieurs territoriaux que par un grand nombre d’attachés territoriaux.
Depuis un an, au Conseil régional Hauts de France, la majorité des encadrants n’ont que deux « mots » à la bouche : construire des éléments de langage (de la forme pas du fond !) et travailler partout en fameux mode projet…
Les faits et la réalité professionnelle vécus ici sont bien éloignés de cette constante communication. En réalité, on fait ici peu à peu disparaître les différents métiers d’ingénierie de projet, leurs spécificités et leurs apports dans l’ingénierie publique et les services de biens communs qu’elle est censée apporter aux habitants.
La première phase de la manœuvre a été le choix de l’exécutif des Hauts de France de faire disparaître les spécificités des métiers de management de projets au nom de l’harmonisation des métiers dans la nouvelle région fusionnée et de la sacro-sainte polyvalence quitte à perdre en qualité de service public.
La plus grande majorité des organisations du travail – qui, elles, fonctionnent tandis qu’au Conseil régional Hauts de France les conditions de travail sont très dégradées, distinguent les métiers de chef de projet opérationnel et chef de projet stratégique et multi-partenariaux qui relèvent de fait de compétences et d’objectifs distincts.
Or, dorénavant, au Conseil régional Hauts de France, que vous gériez des projets opérationnels internes à financements propres ou que l’on vous demande de générer et gérer des projets stratégiques multi-partenariaux et à co-financements complexes, vous avez la même fiche métier …. Et donc les mêmes attendus de compétences ….Et donc des objectifs et des critères d’évaluation similaires…tandis que cette évaluation viendra bientôt sur choix de l’exécutif régional conditionner sensiblement notre régime indemnitaire au moyen d’une prime au mérite… Premier appauvrissement de l’ingénierie de projet en Hauts de France (et de ses différents métiers), ingénierie de projet publique pourtant si importante à la qualité du service public régional…
Deuxième phase de la manœuvre, le Conseil Régional Hauts de France décide cette fois de sanctionner nombre de ses attachés, ici par un méchant jeu de blocage de leur promotion interne.
C’est un nouveau coup très lourd de conséquences que vient de décider de porter notre exécutif à la majorité de ses attachés territoriaux exerçant des métiers de conduite de projets ou d’expertise ainsi qu’à la qualité de l’ingénierie de projet de notre Conseil régional. L’exécutif du Conseil régional Hauts de France vient en effet, par le biais de la CAP A, de décider d’imposer – à l’encontre des décrets nationaux – un critère d’encadrement à la promotion au cadre d’emploi des attachés hors classe, excluant de fait toute promotion interne des attachés principaux non encadrants à ce cadre d’emploi même s’ils en remplissent les conditions d’ancienneté et de niveau hiérarchique. Il semble qu’une fois de plus le Conseil régional Hauts de France se joue des obligations nationales. La libre administration des collectivités ne les exonèrent en aucun cas de respecter le cadre légal national qui s’impose à elles, Conseil régional Hauts de France compris!
Par ailleurs, cette décision régionale des Hauts de France est en totale incohérence avec la récente fusion des régions et la nouvelle organisation administrative française issues des Lois MAPTAM et NOTRe. D’une part, la majorité des régions françaises dont la nôtre (6 millions d’habitants) recouvrent désormais des territoires plus peuplés que la moitié des pays du continent européen. Rappelons également que la clause de compétences générales a été supprimée et que les Lois MAPTAM et NOTRe ont déterminé des compétences spécifiques propres à chaque strate de collectivités … Très rares restent les compétences partagées ! Depuis, les Régions pilotent la coordination de politiques publiques et développent des services publics dont la mise en œuvre de proximité est la plupart du temps assurée par des tiers (SNCF pour les TER, transporteurs pour les transports scolaires et interurbains, Education nationale et enseignement agricole pour les lycées avec la double autorité hiérarchique et fonctionnelle, orientation …). De fait, si l’ingénierie de projet est importante pour toutes les collectivités, elle l’est d’autant plus pour les Régions qui doivent être en capacité technique de faire atteindre leurs propres objectifs de service public par des acteurs externes le plus souvent au moyen de conventions complexes. Qu’on le veuille ou non, le rôle des Régions et donc une partie significative du travail de leurs agents sont différents de celui des collectivités locales de proximité, comme les mairies par exemple…
Et les décrets nationaux de 2016 créant les deux nouveaux cadres d’emploi des attachés territoriaux (attaché et attaché hors classe) prennent en compte cette évolution de la gestion des politiques publiques. Ils actent de l’importance de l’ingénierie de projet publique qu’ils reconnaissent comme de plus en plus intrinsèque au plus la strate territoriale est éloignée de l’exécution directe du service public et particulièrement dans les Conseils Régionaux et Départementaux.
C’est pourquoi, concernant la promotion au cadre d’emploi d’attaché hors classe, les décrets nationaux sont clairs et prévoient très précisément les conditions de promotion interne d’attachés principaux exerçant des fonctions notamment de conduite de projet et d’expertise, en fixant des seuils de promouvabilité calculés au regard de la taille démographique de leurs collectivités employeurs et donc de la nouvelle nature de leurs compétences et de leur mode de gestion. L’importance de l’ingénierie publique et de la carrière des agents qui l’exercent est ainsi reconnue pas ces décrets.
Pour les attachés principaux exerçant des métiers de projet et d’expertise dans les Conseils régionaux des Régions de plus de 2 millions d’habitants comme la nôtre, les décrets* prévoient, entre autres, les conditions d’avancement suivantes au cadre d’emploi des attachés hors classe : elles concernent les attachés principaux ayant atteint au moins le 5ème échelon de leur grade, justifiant de 8 ans d’exercice dans un cadre d’emploi de catégorie A « de fonction de direction, d’encadrement, de conduite de projet ou d’expertise » et de niveau hiérarchique au plus inférieur de deux niveaux à celui des emplois fonctionnels de directions de leurs collectivités.
Or, lors de la CAP A de cet automne, nous avons appris que l’exécutif du Conseil régional avait décidé malgré la Loi d’imposer quand même un critère d’encadrement pour cette promotion interne…
La CGT Hauts de France s’insurge contre cette décision discriminatoire qui vient pénaliser à termes la qualité de l’ingénierie de projet régionale et, dès à présent, les conditions de travail et de vie des attachés territoriaux qui la mettent en œuvre.
La CGT Hauts de France rappelle que si l’assemblée délibérante du Conseil régional est bien autorisée à fixer un taux de promotion (après avis du comité technique compétent), cette assemblée ne peut imposer, au vu des décrets nationaux cités, un critère d’encadrement pour la promotion interne au cadre d’emploi des attachés hors classe qui en exclurait les attachés principaux cadres d’expertise et de projet répondant aux critères nationaux d’ancienneté et de niveau hiérarchique.
La CGT Hauts de France revendique à ce titre l’abrogation de ce critère interne discriminatoire à l’encontre de cadres de projet ou d’expertise du Conseil régional Hauts de France.
*Décrets n°2016-1798 et 2016-1799 du 20 décembre 2016